À travers Monti

Karin
il y a 3 jours
3 min de lecture

Aujourd’hui, nous prenons de la hauteur pour explorer une série de Monti de la commune de Gordola.

Les Monti, dans le sens tessinois du terme, sont des hameaux d’altitude: habitats saisonniers utilisés dès le Moyen-Âge pour l’estivage du bétail et la production de fromage. Ils étaient constitués de rustici rudimentaires en pierre, de terrasses agricoles et reliés entre eux par des chemins muletiers. Pourtant, dans certains de ces lieux, des pierres à cupules et des gravures rupestres témoignent d’une présence humaine bien plus ancienne.

À partir du XIXe siècle, l’abandon de l’agriculture de montagne a entraîné le déclin de bon nombre de ces hameaux. Quelques rustici ont survécu et ont été restaurés comme résidences d’été. L’unique route carrossable, construite durant la Première Guerre mondiale, a permis à Monti di Motti notamment de développer un petit tourisme avec l’essor de la randonnée et du VTT.

Nous commençons notre boucle à Monti di Ditto, 854 mètres d’altitude. Depuis l’oratoire, la vue s’ouvre sur le Monte Tamaro et le lac Majeur: une échappée splendide qui compense les innombrables virages en épingle de la route étroite que nous venons d’affronter. En cette saison, beaucoup de rustici sont fermés. Ils sont néanmoins bien entretenus et sur quelques sites, ça bosse dur. On est samedi. Un peu plus haut, le Sassariente nous domine de son éperon triangulaire rocheux.

J’apprécie moyennement l’étroit sentier qui nous relie à Bazzadée. Couvert de feuilles, longeant un précipice, il traverse une magnifique forêt de hêtres sur laquelle je préfère me concentrer: la lumière, le contraste entre leurs troncs lisses et gris et le parterre de feuilles fauves. Au loin, quelques échappées vers la plaine de Magadino nous permettent de juger de l'évolution du bouchon sur la route qui relie Locarno à Bellinzona. On n’est pas bien, là ?

Bazzadée apparaît soudain, coupé du monde. Le hameau, semi-abandonné, a quelque chose de suspendu hors du temps. En contrebas, même la plaine industrielle n’apparaît plus. Nos jambes ont déjà bien travaillé mais nous ne sommes qu’à 859 mètres d’altitude: cinq mètres de plus que notre point de départ. On s’encourage.

La montée vers Monti di Metri à 985 mètres est, elle, plus agréable. Nous trouvons un muret chauffé par le soleil pour notre pique-nique, avec le lac et Locarno en toile de fond.

D’ici nous effectuons un détour qui va nous ramener à 730 mètres pour rejoindre Miescio, en passant devant les semi-ruines de A Vertum. Miescio est aujourd’hui totalement abandonné. À part peut-être un bâtiment plus cossu où flottent encore deux drapeaux suisses délavés. Le reste est un enchevêtrement de pierres effondrées. Quant à la vue espérée sur le barrage de la Verzasca, elle est plutôt timide.

Les ruines bâchées de A Vertum sont celles qui ont le plus d'intérêt historique. On y trouve des pierres gravées de signes rupestres. Mais sur le moment, nous l'ignorions et étions plus préoccupés à mettre un pied devant l'autre.

Revenant sur nos pas, nous allons en grinçant et soufflant effectuer le dénivelé qui va enfin nous faire franchir la barre des 1000 mètres et atteindre Monti di Motti. Des rustici bien entretenus, un grotto fermé pour l’hiver, un petit lac et une église à l’architecture futuriste. Le panorama est saisissant: un balcon sur le lac Majeur et les Alpes dans la lumière argentée du soleil qui décline déjà.

Pour clore la boucle, nous redescendons par la petite route étroite. La pente est douce, la marche agréable mais le trajet semble interminable. Au loin, Monti di Ditto, notre point de départ, posé sur sa colline, refuse de se rapprocher.