top of page
  • Photo du rédacteurKarin

La mer

La mer, qu’on voit danser…

Moi aussi, je voulais voir la mer, j’étais en manque. Mais avant cela, il fallait nous annoncer auprès de notre agriturismo, réservé via mon coffret Smartbox « Trois jours en Italie » qui vend du rêve pour deux nuits avec petit déjeuner. On l’aura compris, je ne suis pas influenceuse pour Smartbox alors liquidons le sujet avant de passer à autre chose. J’ai choisi l’endroit en fonction de sa proximité avec le Jardin des Tarots et la Méditerrannée. Nous nous trouvons dans la parc régional de la Maremma, une zone tellement protégée qu’il faut acheter son ticket et réserver son créneau pour aller y randonner. La région, très plate et agricole, regorge d’établissements de ce type qui sont certainement plus recommandables que celui dans lequel nous sommes tombés.

Dans un premier temps, nous ne le trouvons tout simplement pas, puis arrivons dans une propriété vide, baladés dans des chemins de terre par des pancartes rouillées datant du siècle dernier et notre GPS qui veut nous faire tourner dans le talus. Après avoir téléphoné, nous finissons par atteindre notre but où l’on nous explique d’un ton blasé qu’on a suivi de vieilles indications qui mènent à l’ancienne structure fermée il y a vingt ans. Alors, j’ai envie de dire, quand on propose des services touristiques, il vaut mieux aller les référencer correctement sur Google Map. Même moi je sais le faire et j’aurais volontiers aidé la dame en ce sens si elle avait été un chouïa plus aimable. En 30 secondes elle nous fait la promo de la région et s’inquiète de savoir si on va manger dans son resto ce soir.

La chambre est correcte mais le reste n’est vraiment pas terrible. Les extérieurs sont peu mis en valeur. La salle commune est entourée de panneaux coulissants en plexiglas devenu opaque et l’on peut éventuellement s’y asseoir sur de vieux canapés de récup recouverts de draps tout aussi crades. Le repas extorqué est beaucoup trop cher, pas bon et pas forcément élaboré avec des produits locaux, le pain du petit déj est sec et la salle à manger ressemble à une cantine de camping, avec comme uniques décorations d’énormes radiateurs. Ceux-ci ne doivent d’ailleurs pas fonctionner car au milieu des six clients que nous sommes, on a placé un chauffage à gaz.

Maintenant que c’est fait, allons voir la mer. D’abord à Talamone, un village perché sur la falaise, qui semble très joli lorsqu’on y arrive en voiture, puis beaucoup moins lorsqu’on s’y promène. Il y a un vent terrible, habituel dans la région, qui s’apparente au mistral. Nous ne nous entendons pas parler dans le bruit des mâts qui s’entrechoquent. Nous ne croiserons personne dans les rues. Mais voilà, elle est là. La mer. Et dans mes folies de grandeurs, je décide que nous sommes en face de l’Ile d’Elbe alors qu’il s’agit de l’Arcipelo Toscano.


Le lendemain, c’est LA journée du Jardin des Tarots qui n’ouvre que l’après-midi. Sans but précis, nous partons nous aventurer sur la péninsule du Monte Argentario et nous arrêtons à Porto San Stefano. Hormis un beau voilier, une forteresse espagnole et le fait que le Costa Concordia se soit échoué non loin, nous n’y trouvons rien de notable. Nous partons alors en direction du village d’Ansedonia que nous ne trouverons jamais mais qui ne consiste apparemment qu’en résidences secondaires pour l’heure fermées.


Si bien que nous allons monter sur l’Argentario afin d’atteindre dans un premier temps le couvent de la Présentation au Temple, datant du XVIIIe. D’ici, on a une superbe vue sur la langue de la péninsule (en géo, j’enseignais seulement le canton de Vaud, ça se voit?) Non loin de la route tortueuse que nous allons continuer à suivre, nous avisons une carcasse de voiture qui semble avoir été jetée dans le précipice. Soit quelqu’un a voulu éviter des frais, soit un moine est rentré bourré.



Plus haut encore, mon Dieu, nous trouvons la Croix monumentale, édifiée par une congrégation de Frères Passionistes avec l’aide des habitants de la région qui avaient quelques péchés à se faire pardonner. Elle fut inaugurée en 1934 avec sa plaque mentionnant Victor Emmanuel II et Benito Mussolini. Mais en 1944, afin d’éviter qu’elle ne serve de repaire aux bombardiers, elle fut démolie. Reconstruite en 1948 grâce aux mêmes Frères toujours aussi passionnés, elle est éclairée de nuit depuis 1966 et un maire désireux de gagner des élections. Au cours de ce siècle, la croix a eu de la concurrence avec le dieu progrès. On a d’abord trouvé que les collines voisines se prêtaient bien à l’implantation d’antennes pour la télévision. Puis, on a estimé que c’était encore mieux si les répétiteurs pour la téléphonie mobile, on les fichait à côté de l’édifice. Si bien que ce lieu qui avait été choisi pour son calme et son panorama exceptionnel sur la mer est plus hérissé qu’autre chose. Sur les grillages entourant le socle se trouve un amoncellement d’ex-voto bricolés sur place avec des offrandes aussi étonnantes qu’un sachet de sucre ou un jouet Kinder. Le Grand s’y essaiera mais il n’a pas l’habitude, ça se voit.



Nous nous dirigeons ensuite vers Capalbio, un magnifique village médiéval à la frontière entre la Toscane et le Latium. Un double rempart à deux niveaux le protège. Pas de véhicule dans les ruelles, de toute façon ça ne passerait pas. À côté du château se trouve un musée conservant le piano sur lequel Puccini, encore lui, jouait lorsqu’il venait séjourner ici. C'est aussi sur cette localité que se situe le Jardin des Tarots. Le reste n'a rien à voir avec Niki, mais le village a été longtemps le fief des Romains de gauche avant de devenir un lieu de villégiature à la mode et limite huppé. Bref, je ne suis pas sûre qu'il reste beaucoup d'autochtones à l'année derrière les remparts et l'endroit doit être assez insupportable en pleine saison.


Après notre visite au Jardin des Tarots, qui nécessitera un billet à lui tout seul évidemment, nous partons en direction de la ville portuaire de Civitavecchia du fait de ma frustration de mer. Avisant une petite ville perchée sur une colline, nous changeons d’avis pour visiter Tarquinia, et je pense que nous avons fait le bon choix.


Depuis là, mes photos se font rares car nous allons nous faire des amis et je vais être préposée relations publiques. Près d’une église ancienne, je me ferai harponner par une Américaine vivant ici depuis 30 ans et souhaitant visiblement me donner des explications sur sa cité d’adoption. À peine l’avons-nous quittée sur quelques recommandations avisées que nous tombons sur Giani, un retraité natif de Tarquinia qui nous a entendus parler français. Il va nous faire entrer dans l’hôtel-de-ville où nous allons voir des fresques magnifiques dans un bâtiment qui a frôlé l’abandon.



Dans la foulée, Giani va nous promener dans les remparts et nous faire découvrir des églises très anciennes aux inspirations orientales. Aux portes de cette bourgade aux origines étrusques, il va nous montrer que nous nous retrouvons sans transition au coeur d’une campagne verdoyante qui regorge de lieux archéologiques.



Il va nous guider dans les ruelles en nous donnant mille explications et citant des dizaines de proverbes, le tout en italien, dans un flot de connaissances que j’ai évidemment pour une bonne part oubliées. Le Grand me laisse patauger dans la culture pendant qu’il a tout loisir de faire ses photos.



Le Giani connait tout le monde et s’interrompt pour dire ciao! à gauche et à droite. Au moment où il m’explique à voix très haute en quoi les Français l’horripilent et à quel point ils sont deficienti, il tombe sur la seule tablée gauloise où l’on capite le latin et s’éclipse un moment pour aller s’excuser. Cela finira par un Spritz en terrasse pour remercier notre guide privé qui trouve les Suisses romands bien plus sympas que les Français avec leur petit accent pointu (sic!) D’ailleurs, s’il nous a abordés, c’était avec une idée première de se foutre de notre fiole. Gianino, il est de gauche, mais il aime ni les Frouzes, ni les Allemands, ni les Milanais, ni les migrants. Et puis, les gens des Apennins qui viennent marcher ici, ils sont quand même bizarres. Quand on lui dira que le surnom de Macron, c’est Macrotte, je crois qu’on lui aura fait sa journée. Plus que les chips dans lesquelles il n’a pas arrêté de taper. C’était une rencontre extraordinaire.

Du coup, on s’est mis de nuit et il nous faudra plus d’une heure de route pour rejoindre notre agriturismo où fort heureusement, le restaurant est fermé le mardi.

Sources:

Posts récents

Voir tout

Parme

bottom of page