Karin
Aiuto!
Appel (un peu désespéré) d’une tessinoise à ses amis romands et suisses allemands.
Je viens de tomber sur un post qui s’offusque de voir nos Conseillers fédéraux hués sur les réseaux sociaux « parce qu’ils n’ont pas prononcé le mot confinement ». Le peuple suisse doit être fier qu’on lui laisse le choix de ses responsabilités. On est donc encore libres de prendre les bonnes décisions, en faisant preuve de bon sens.
Merci à ce monsieur de m’avoir donné l’introduction de mon billet d’humeur de la nuit car vous imaginez bien que je ne suis pas d’accord.
Le canton du Tessin essaie depuis des semaines de lancer des signaux d’alarme. Hier, il a dû introduire de nouvelles mesures. Il a pris ses responsabilités pour sauver sa population, et peut-être la vôtre dans quelques jours. Et il s’est fait une fois de plus taper sur les doigts par le Conseil fédéral, une fois de plus au nom de l’économie. Sans compter l’intervention offusquée et purement égoïste d’un grand patron alémanique qui estime que c’est au canton de payer les frais de cette mesure. Car il doit prendre ses responsabilités ? C’est ubuesque !
Ouvrez un peu plus les yeux sur ce qui se passe ici. Puisque l’on doit essuyer les plâtres, intéressez-vous au moins à nous. Même si vous ne comprenez pas l’italien, écoutez l’interview de Christiano Vitta, président du gouvernement tessinois, qui intervenait hier soir sur la RSI. Vous en saisirez, j’en suis sûre, la substance. Vous verrez qu’il est exténué. Vous devinerez que ce n’est pas sa voix de tous les jours.
Zappez, s’il le faut, jusqu’à 2 minutes 40. Je suis sûre que vous pourrez saisir de quelle manière il tente de redonner la foi à ses troupes dépitées avec des larmes dans la voix et en remerciant à demi-mot ses concitoyens des sacrifices qu’ils font pour la Suisse. Et ne venez surtout pas me dire que les latins sont de grands comédiens. D’après des statistiques, qui de plus semblent fausses car les chiffres sont beaucoup plus élevés (la RSI l’explique d’ailleurs dans l’un de ses reportages), le Tessin dénombre aujourd’hui 48 morts sur les 60 décès dans notre pays.
Il se passe, en Suisse italienne, quelque chose de très fort. Quelque chose qui va aussi nous dépasser sous peu. Regardez ce qui émerge dans les médias tessinois. Sur les réseaux sociaux, si c’est votre seule référence. Il est en train de monter dans mon canton une immense frustration, peut-être enfouie depuis longtemps, d’une minorité qui en prend plein la figure. Tiens, ça serait sympa, une petite guerre civile par dessus tout ce bazar, non ?
Ici, au Tessin, le Conseil fédéral se fait huer parce que lui-même n’a pas le sens des responsabilités. Et ne venez pas me dire que c’est facile de les critiquer, qu’on n’est pas à leur place, que c’est la première fois qu’ils doivent prendre ces décisions, gna, gna, gna. Il y a certaines choses qui sautent aux yeux, ce n'est pas bien difficile à comprendre, même moi qui suis institutrice, j’y arrive. Lorsque les événements vont aussi vite qu’il m’est bientôt impossible de retrouver les informations datant de deux jours sur des sites officiels, il n’est plus tellement l’heure d’ergoter entre la poire et le fromage et de prendre ses week-end. Amis romands, et les autres aussi, réveillez-vous! Mais n’oubliez pas, également, qu’en ce qui concerne un coup de pied dans ce fédéralisme, les Tessinois se seront battus pour vous.
Si c’est plus parlant d'un point de vue géographique, jetez un oeil sur Verbier.
Alors je crois que MAINTENANT, je fais un peu de politique. C’était mon « O bella ciao » à moi.
Ah, j’oubliais! Depuis lundi, quelques familles suisses allemandes en télé-travail se sont précipitées ici dans leurs résidences secondaires avec enfants et bagages. Comme ça, s’ils tombent malades, ils seront soignés dans nos hôpitaux déjà surchargés et pas à Berne. C’est bien d’être encore libres de prendre les bonnes décisions et de faire preuve de bon sens.
Vous n’avez pas besoin de me demander la permission, partagez, et comme il faut, de bleu.
Et comme le dit mon nouvel ami Christiano : Uniti c’è la faremo.