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  • Photo du rédacteurKarin

Presse locale



Ce mois-ci, j’expose mes petits formats au Salon UNIcréa qui se tient au Château de La Sarraz. Depuis mon inscription, les organisateurs nous rabâchent les oreilles, voire les yeux, par mail, afin que nous alertions la presse régionale de notre participation à l’événement. Je prends le temps de la réflexion mais pourquoi pas, me dis-je. Cela fait d’ailleurs un moment que je remets sans arrêt à plus tard l'idée de contacter le journal, en pensant qu’on pourrait écrire un petit article sur le fait qu’une autochtone publie une aquarelle par jour sur Instagram. Ce qui, à mon sens, est tout aussi intéressant que les soupers de retraités, le compte rendu du Conseil communal ou les nouvelles de l’agriculture.

Donc, bonne élève, je me fends d’un joli PDF visuel avec tous les liens utiles que j’envoie par courriel à la rédaction de l'hebdomadaire. Quelques jours avant le Salon, n’ayant même pas reçu un accusé de réception, je téléphone à l’imprimerie et tombe sur le rédacteur en chef que je connais juste assez pour le tutoyer. Il semblerait qu’il n’ait jamais vu mon mail, qu'une secrétaire a dû placer dans les indésirables. Mais bon, de toute façon, ça ne les intéresse pas car La Sarraz ne fait pas partie de leur secteur, c’est trop loin.

Ce point-là, expérience faite, je le lui accorde. La Sarraz, depuis où j’habite, c’est le bout du monde. Au quatrième jour de l’exposition, je n’avais pas encore trouvé mes repères et mon GPS non plus. Il faut traverser tout le canton en passant par des bleds qui s’écrivent avec des tirets et qui sont farcis de priorités de droite. On a tout intérêt à être bien latéralisé si l’on ne veut pas se prendre un tracteur de plein fouet. Par moments, mon Tom-Tom m’a embarqué dans des chemins de campagne tellement étroits et boueux que je me suis demandé si je ne devais pas activer le 4x4. Et je me suis imaginé plus d’un fois qu’on allait charger des boilles à lait dans mon coffre parce que j’étais arrivée dans la cour d’une ferme.

Que mon interlocuteur ne souhaite pas faire de la publicité pour un événement qui se déroule dans un autre trou du schtroumpf que le nôtre, finalement, tant pis, puisque même LFM et La Télé en parlent ! Mais sinon, le fait que j’aie une production de plus de 300 illustrations inédites depuis le début de l’année, ça ne les intéresse pas non plus ?

Non plus, car c’est lucratif. Oui, je l’avoue, excusez-moi beaucoup, beaucoup, mes aquarelles, je ne les distribue pas dans la rue, je les vends. Pardonnez-moi si j’ai péché et si mes productions me rapportent en ce moment tous frais déduits un salaire approximatif de 2 francs de l’heure, ce qui est moins qu’un handicapé engagé en atelier protégé. Car il n’est pas besoin d’aller jusque dans les usines d'Asie pour trouver des comparaisons adéquates…

Donc, voilà, étant donné que je gagne de la thune comme une malpropre, je n’ai pas le droit à mon article. A moins, bien sûr, que je m’offre régulièrement quelques annonces dans les pages du journal ou que je commande mes flyers à l’imprimerie. Là, on peut même discuter du prix si je suis vraiment dans le besoin, qu’il me dit.

Si je feuillète les dernières éditions, le comptoir qui aura lieu dans la région a certainement monnayé pour avoir son article, étant donné que l’entrée est payante. A moins que l’idée de proposer au public des parkings gratuits n’ait fait pencher la balance. Le choeur mixte a mis une annonce en contrepartie de quelques lignes et d’une photographie noir-blanc, alors ça va. Et la jeune écrivaine qui publie son premier roman distribue certainement ses ouvrages dans toutes les boîtes aux lettres. Il faut que je la contacte, je n’ai pas reçu mon exemplaire.

Un sujet sur lequel ma presse locale adore écrire, également, c’est le 3ème âge, voire le 4ème. Les sorties, les jubilés, le bal des aînés. On sait tous que s’il y a bien UN truc qui n’est pas lucratif, c'est le vieux ! Alors, je me rassure. Lorsque j’aurai 102 ans et que je ferai des toiles avec les bouts de croûtes de pain que je n’arriverai pas à mâcher, j’y aurai droit, à mon article. Mais en l’état actuel des choses, quand je vois dans quel monde de ploucs on se dirige comme des grands, je ne suis pas tellement sûre de vouloir atteindre cet âge-là.

L’entretien téléphonique s’est conclu de cette sublime façon :

- Quand tu exposeras à Paris, on écrira un article sur toi.

- Oui, mais moâ, mon cher, lorsque j'exposerai à Pâââris, votre feuille de chou, je ne l'utiliserai même pas pour y emballer mon caviar périmé!

Voilà ce que j’aurais dû lui répondre ! On peut rembobiner ?

Chez moi, la presse locale fonctionne donc ainsi.

On parle de la mort du journalisme mais je ne pensais pas que c’en était à ce point-là.

N.B. Suite à cet échange, le rédacteur m’a demandé de lui renvoyer tout de même mon PDF et j’ai eu le grand honneur d’obtenir une brève dans laquelle il s’est contenté de paraphraser ma présentation. Je ne sais pas s’il s’attend à ce que je lui apporte un carton de vin.

#undessinparjour #art #jerâle

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